Des « petits chemins » pour « faire du vélo »

Me rendant à vélo vers Petit Camon, j’empruntai hier l’incontournable traversée de la rocade sur son pont et ses 2 ronds-points, une traversée pensée d’abord pour la voiture, comme beaucoup d’autres autour d’Amiens.

Tandis qu’il me dépassait au premier rond-point, un automobiliste m’a fait part de sa réflexion : « il y a quand-même mieux pour faire du vélo : il y a des petits chemins ! »

Une interpellation verbale de la part d’un automobiliste, chaque cycliste régulier en a l’expérience. Un automobiliste n’y est peut-être pas moins sujet mais, isolé des réalités du monde dans sa bulle vitrée, il les perçoit moins. Toutefois, ce n’est pas sur le fait de l’interpellation que je veux revenir ici.

Cyclistes et automobilistes sont d’accord : de nombreux aménagements sont peu adaptés aux vélos. Cette traversée de rocade en est un bon exemple. Il y a quand-même mieux pour faire du vélo. Mais ajouter que le cycliste devrait se trouver ailleurs, lui reprocher d’utiliser à vélo un aménagement peu adapté mais incontournable pour se rendre quelque part, c’est rejeter la faute sur la victime et pas sur l’aménagement coupable. Dans la veine du « 2 % d’emmerdeurs », terme utilisé un temps par notre président de Métropole pour désigner les cyclistes, le réflexe de culpabilisation du cycliste est plus répandu que ne laisse croire le consensus supposé des messages officiels de vertu relative à la petite reine et plus globalement en faveur de la lutte contre le changement climatique.

Pour ce qui est de l’usage du vélo comme moyen de déplacement, mon automobiliste d’hier exprimait bien ce que pensent encore beaucoup de réfractaires aux changements nécessaires de nos comportements. Pour lui, sur mon vélo, je « fais du vélo », tandis que lui, dans sa voiture, il se rend quelque part. À l’inverse, un cycliste ne se rend pas quelque part. Et d’un automobiliste, on ne dit pas qu’il fait de la voiture. Rappelez-vous, au début des restrictions de déplacement liées au covid, les cyclistes pouvaient enfourcher leurs vélos non pas comme moyens de déplacements, mais comme pratique sportive.

Dans le même sens, j’ai appris un peu plus tard qu’en réponse à la doléance d’un cycliste urbain sur des aménagements cyclables, notre même président de Métropole aurait répondu « vous, amateur de vélo », affirmant là encore qu’un vélo serait utilisé par plaisir, et pas comme moyen de déplacement. En effet, dit-on d’un automobiliste qu’il est amateur de voitures?

Pour ce qui est des « petits chemins », quelques-uns subsistent certes depuis que la rocade s’est imposée au travers de leur maillage initial. Mais la continuité des itinéraires de part et d’autre de la rocade est quasi-nulle, et leur état en permet rarement un usage cyclable effectif.

Lorsqu’il se rend quelque part, le cycliste d’aujourd’hui n’a souvent pas d’alternative à l’usage des aménagements hérités des décennies d’insouciance prévus pour la voiture.

Pressons-nous d’adapter nos territoires aux enjeux du monde d’aujourd’hui.

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